Quand l’intuition porte chance
Qui a vu le film “La chèvre” de Francis Veber se souvient avec le sourire du duo Pierre Richard-Gérard Depardieu, et de leurs aventures pour retrouver une jeune femme particulièrement malchanceuse disparue au Mexique. L’idée d’accroche du film est que seul un autre malchanceux hors pair (joué ici par Pierre Richard) est capable, coup du sort après coup du sort, de retrouver la piste de la disparue. Ainsi, de la malchance utilisée en conscience pourrait naître la chance. Drôle d’histoire, et hypothèse osée ! Mais qu’en dit la science ? La chance et la malchance existent-elles vraiment ? Et, si oui, sommes-nous vraiment capables de les percevoir, et d’alors tirer au mieux profit de notre chance et d’étouffer une malchance qui se profile ? Les recherches sur l’intuition nous apportent des éléments de réponses surprenants.
En 1997, Dick Bierman, un chercheur en psychologie de l’université d’Amsterdam, mena une expérience impliquant des personnes jouant aux cartes pour de l’argent. Bierman souhaitait savoir si les gens peuvent pressentir les bonnes ou les mauvaises nouvelles ; c’est-à-dire savoir si les joueurs peuvent pressentir si les cartes qui leur seront distribuées constitueront une bonne ou une mauvaise main. En mesurant la capacité de la peau des volontaires à conduire l’électricité, Bierman découvrit chez eux de rapides changements électrodermiques avant qu’on leur donne leurs cartes. Qui plus est, les différences tendaient à correspondre au genre de cartes qu’ils recevaient. Ceux qui allaient recevoir une mauvaise main étaient plus fébriles, et la machine enregistrait tous les signes de réaction de type combat-fuite [1]. II semblerait donc que, à un niveau physiologique inconscient, nous ayons le pressentiment que nous allons recevoir de mauvaises nouvelles ou être victimes d’une malchance [2].

Allons maintenant plus loin ! Nous serait-il possible de faire plier le hasard en mobilisant volontairement notre intuition ?
Imaginez-vous devant un ordinateur, à participer à une expérience impliquant du hasard. Votre tâche est uniquement d’appuyer sur une touche au moment que vous le souhaitez. A l’appui de la touche, suivant le moment que vous avez choisi, cela détermine un nombre de 1 à 10.000. Ce nombre est un nombre de départ lançant alors une séquence mathématique hautement complexe de 0 et de 1. La machine contenant 10.000 nombres de départ possibles, cela représente par conséquent 10.000 possibilités de séquences différentes pouvant être générées par l’ordinateur. Ce générateur est conçu pour produire des séquences aléatoires constituées de 0 et de 1, sans ordre particulier connu de vous. Dans cette expérience, la règle du jeu est que les séquences comportant le plus de 1 sont dites être les meilleures. Votre objectif est donc de lancer la machine à un moment précis afin de lancer la meilleure séquence possible, soit une séquence comportant le plus grand nombre possible de 1. Ce dernier élément est particulièrement délicat puisque la marge de sélection est incroyablement petite. En effet, vu que l’horloge de l’ordinateur marque cinquante coups à la seconde, le bon nombre de départ sort dans une fourchette d’une durée de vingt millisecondes, soit dix fois plus vite que le temps humain de réaction. Pour réussir, il faut en quelque sorte percevoir intuitivement quand le bon nombre de départ va sortir et appuyer sur le bouton exactement à cette milliseconde. Et tout ceci tout en n’ayant aucune connaissance de la séquence de 1 et de 0 qui peut être produite par tel ou tel nombre de départ !

La question qui se pose désormais est : peut-on utiliser consciemment notre intuition pour être particulièrement chanceux dans un domaine de la « vie réelle » ? Pour répondre à cette question, de nombreuses expériences d’applications des principes vus ci-dessus ont été menées depuis les années 1970. En voici un exemple.

Au vu de ces études, et des centaines d’autres de ce type qui ont été menées ces dernières décennies, nous pouvons en dégager un certain nombre d’enseignements sur ce qui fait que nous pouvons être plus ou moins chanceux dans nos décisions et dans nos vies. Tout d’abord, ces études montrent que nous avons la capacité de percevoir intuitivement le cours des choses et, qu’ensuite, nous avons la capacité de faire des choix qui vont nous permettre d’attirer à nous les possibilités les plus profitables et d’écarter les possibilités qui le sont moins. En somme, la chance est à portée de notre intuition, pour peu que nous en ayons conscience et que nous l’utilisions d’une manière adéquate.
Notes :
1. D. J. Bierman et D. I. Radin, « Anomalous anticipatory response on randomized future conditions », Perceptual and Motor Skills, 1997, vol. 84, p. 689-690.
2. D.J. Bierman « Anomalous aspects of intuition », document présenté à la quatrième rencontre biennale européenne de la Society for Scientific Exploration, qui s’est tenue à Valence du 9 au 11 octobre 1998.
3. D. I. Radin et E. C. May, « Testing the intuitive data sorting model with pseudorandom number generators : a proposed method », dans D. H. Weiner et R. G. Nelson, éditeurs, Research in Parapsychology 1986, Metuchen (New Jersey), Scarecrow Press, 1987, p. 109-111.
4. Targ Russell, « L’esprit sans limites, la physique des miracles », éditions Trajectoire, 2012.
Crédit Photo : 123RF – supernam, zentilia, Maksym Yemelyanov














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